Avec 150 CHF (138€), vous payez 1 mois de formation professionnelle d’un adulte à Juba !
Contexte et besoins identifiés
Né en 2011 dans une situation de post-conflit, le plus jeune pays du monde (et l’un des plus pauvres) avait à peine entamé un processus de résilience et de reconstruction qu’un conflit interne éclatait fin 2013.
La zone d’intervention du programme est la capitale, Juba, et ses environs. La ville a été épargnée par les combats (sauf les premiers jours et en juillet 2016), mais a accueilli des dizaines de milliers de déplacés.
Situé au Sud-Est de Juba, Lologo est un bidonville de 5000 personnes. C'est là que, dès 2007, nous avons décidé de soutenir la création d’un Centre de Formation Professionnelle et de Développement Communautaire (CFPDC).
L’objectif global du projet est de «retirer les fusils des mains pour y mettre des truelles ou des bêches», autrement dit participer à la pacification du pays et à son développement.
«Du fait de la situation de crise chronique, l’aide au développement y est peu existante. A contre-courant de cette tendance des ONGs présentes, l’initiative mise en œuvre par le partenaire local est quasiment unique dans le pays et a déjà prouvé sa pertinence. Plutôt que de soigner les symptômes, ce programme s’attaque à l’origine des maux qui ont conduit à la situation de violence dans le pays : l’absence de perspective, le manque des conditions de base permettant d’envisager sereinement le futur». (extrait du rapport d'évaluation >> réalisé par un consultant externe mandaté en 2016 par la Ville de Genève).
En effet, après des décennies de conflits, beaucoup d’adultes sont aujourd’hui toujours démunis de tout capital :
- Financier: impossibilité d’investir dans un outillage.
- Foncier: pas d’agriculture de subsistance; à Juba, beaucoup de déplacés n’ont plus accès aux terres qu’ils cultivaient.
- Humain: les conflits ont fait des victimes dans toutes les familles, chacun a perdu des proches; et les migrations ne favorisent pas la création de réseau.
- Intellectuel: l’analphabétisme induit un manque de perspective, et des limites, contraintes et freins continuels dans les démarches professionnelles.
- Technique: n’ayant aucune compétence acquise au cours d’une formation, ces adultes se retrouvent à faire les mêmes activités, celles qui requièrent peu de compétences au sein d’une économie informelle (production et vente d’alcool pour les femmes; taxi-motos pour les hommes). L’offre de formation dans les instituts d’Etat est limitée.
- Temps: l’énergie est consacré à gérer l’urgence, la survie; l’apprentissage d’un métier, le démarrage d’une activité requiert du temps non immédiatement rentabilisé.
- Culturel: les femmes limitées à leur rôle traditionnel (ménagère, cuisiner, garder les enfants...). La subordination des femmes est ancrée dans le système patriarcal et les coutumes locales.
- Confiance: l’entrepreneuriat est moins envisagé que l’assistanat.
En quelques années, dans un pays au corps social perclus de handicaps de toutes sortes consécutifs à des décennies de guerre civile, le CFPDC de Lologo est devenu une référence régionale, voire nationale, en matière de dynamisme et de résilience.
«SVDP a prouvé sa capacité à identifier les besoins des populations locales, à mettre en place des programmes y répondant, à les organiser et à les gérer avec transparence et professionnalisme.» (extrait du rapport d'évaluation >> réalisé par un consultant externe mandaté en 2016 par la Ville de Genève)
Le Centre de Formation Professionnelle de Lologo
Construit en 2008 et inauguré en 2009, ce centre a commencé par dispenser trois formations très demandées dans une région où tout est à reconstruire: maçonnerie, électricité et menuiserie (cette dernière a été arrêtée après quelques années).
En 2012, pour répondre à la forte demande locale, il a été décidé de mettre en place trois nouvelles formations: couture, informatique et réparation automobile.
Depuis 2015, le Centre offre également une formation à l'exploitation d’une ferme familiale, destinée aux femmes, et une formation santé/hygiène/premiers secours.
Depuis 2020, une formation en soudure est aussi proposée.
Fin 2020, près de 4300 adultes auront été formés depuis l’ouverture du CFPDC. Plus de 3600 sont sortis avec un diplôme.
Avec les personnes de l’entourage direct des diplômés, on peut estimer que le nombre de bénéficiaires est à ce jour de l’ordre de 18 000.
Le groupe-cible est constitué des adultes (16-40 ans) disposant d’un revenu inférieur à 1€ par jour, en particulier ceux de Juba et des environs, soit une population estimée à environ à 160 000 habitants.
Une attention particulière est donnée aux plus vulnérables: ex-enfants soldats, veuves, mères célibataires, anciens combattants, jeunes ayant eu une scolarité sporadique, chômeurs, adultes n’ayant jamais bénéficié de formation professionnelle, prisonniers, personnes souffrants de handicap physique ou psychique non dirimant... La moitié environ des places de formations proposées requièrent toutefois un minimum d’alphabétisation.
La proportion de femmes diplômées a augmenté de 3% en 2011 à près de 50% depuis 2015.
Le CFPDC répond à une demande croissante de la population : plus de 800 postulants pour les 360 places dans les dernières années.
Les formations commencent en février. La remise de diplôme a lieu en décembre.
Pour tenir compte de l'environnement multiculturel de cette région, les cours sont donnés à la fois en arabe et en anglais.
Chaque formation dispensée comprend un pan théorique et une partie pratique. Les travaux pratiques se déroulent généralement dans les ateliers du centre. Mais pendant trois semaines, ils ont lieu à l'extérieur, afin de familiariser les apprentis avec leur futur environnement professionnel.
En 2012 et 2013 SVDP a collaboré avec l’UNIDO (United Nations Industrial Development Organization) en formant pour eux 700 adultes en plus des 360 adultes du programme lui-même.
En 2018 et 2019, SVDP a formé également 80 personnes pour l’ONG World Vision.
Au total, à fin 2020, près de 900 diplômé(e)s ont reçu des kits d’outillage pour les aider à se lancer dans une activité indépendante.
Depuis 2018, une soixantaine de diplômé(e)s ont accès à du micro-crédit chaque année.
Plus de 50% des diplômés sont financièrement indépendants trois mois après l’obtention du diplôme.
«Le représentant du Ministère du Travail a fait part de son admiration pour la qualité du travail fournit par SVDP qui représente, selon lui «la plus importante et meilleure initiative de formation professionnelle dans le pays ». Il encourage la réplication du Centre dans d’autres Etats (…)
L'évêque auxiliaire de Juba est fier des résultats obtenus par SVDP sur le terrain que son Evêché a donné gracieusement à l’organisation. Il confirme que rien de plus utile n’aurait pu être réalisé sur ce grand terrain de 9 ha.» (extrait du rapport d'évaluation >> réalisé par un consultant externe mandaté en 2016 par la Ville de Genève)
Un Centre de formation professionnelle… et de développement communautaire
Un autre objectif du CFPDC de Lologo est de renforcer les capacités personnelles et collectives afin d’améliorer le «vivre ensemble».
Tous les acteurs du projet apprennent à résoudre les conflits, à travailler ensemble, à planifier des objectifs et un avenir communs.
Ils participent aux activités au sein du CFPDC en respectant les principes de respect du pluralisme et de la diversité (sexuée, ethnique, religieuse et culturelle), clairement explicités par le partenaire local dès l’inauguration du Centre en 2009.
Des conférences, ouvertes à tout le monde, sont organisées au sein du CFPDC, sur la promotion de la paix, l’agriculture raisonnée, les droits de l’homme, le respect du pluralisme et de la diversité.
Sur le terrain du CFPDC, ont été construit :
- une école maternelle et primaire qui accueille plus d'un millier d'enfants de familles défavorisées;
- une halle où est distribué un repas, 3 fois par semaine, à 350 enfants de moins de 5 ans (notamment des élèves de l’école);
- une chapelle qui est devenu un lieu de culte dominical pour la population locale.
«Excellentes relations et symbiose entre le Centre de Lologo et sa population riveraine, grâce aux activités communautaires, à la participation active de la communauté dans la prise de décision, au soutien offert aux enfants malnutris, à l’éducation scolaire pour tous, aux formations professionnelles en priorité destinées à la communauté (…)
Enfin, les deux représentants du Conseil des Anciens rencontrés ont confirmé avec leurs propres mots l’harmonie qui règne entre le Centre et la population locale. Ils ont affirmé être régulièrement consultés, afin de partager leurs idées lorsque des décisions stratégiques par rapport à la vie du Centre sont prises. Ils sont conscients des bénéfices directs pour leur communauté, puisque leurs enfants ont accès en priorité aux formations (…)
Dans la plupart des cas, les décisions stratégiques se prennent tout d’abord avec la population locale, puis en consultation avec l’équipe managériale sur place.» (extrait du rapport d'évaluation >> réalisé par un consultant externe mandaté en 2016 par la Ville de Genève).
Témoignages de diplômés
Dina Patrisio est une jeune femme qui vit près du centre : «J'ai dû interrompre assez tôt ma scolarité étant donné les grandes difficultés financières de ma famille. Pendant des années, j'ai travaillé dur pour des artisans ou en faisant des travaux de couture, mais cela ne suffisait pas. Lorsque j'ai eu mon diplôme d'électricienne de Lologo, j'ai postulé à un poste de technicienne en électricité dans un bureau des Nations Unis près de l'aéroport. J'ai été choisie parmi les nombreux candidats, et j'ai l'impression de récolter enfin les fruits de mon zèle. Je suis ravie d'avoir ce travail et j'envisage de me marier prochainement.»
Sunday Alismaya est originaire de l'Etat de Ouest Equatoria d'où il est arrivé en 2006 pour chercher du travail : «Comme je n'avais aucune qualification, je prenais tout et n'importe quoi, au jour le jour. Je me suis inscris en maçonnerie, dans la seconde promotion. Mon diplôme en poche je suis allé dans l'Etat des Lacs où je savais qu'il y avait des opportunités de travail. J'ai été embauché dans une entreprise qui paient bien, de sorte que j'ai déjà pu envoyer à mes parents, qui vivent dans ma ville natale de Mundry, de quoi construire une petite maison de deux chambres.»
Juro Petrous Hassen, à l'issue de sa formation en maçonnerie : «L'envie de nous inscrire nous est venue, avec des amis, en voyant des travailleurs ougandais rénover les bâtiments du centre. On s'est dit que le développement de notre région ne pourrait se faire sur le long terme en important de la main d'œuvre étrangère. Je n'y connaissais absolument rien avant de commencer la formation. J'étais très déterminée, ce qui m'a permis de résister aux sarcasmes de ceux pour qui la maçonnerie n'est pas un travail pour une femme. Je suis sûre que beaucoup de femmes s'inscriront à la prochaine session parce qu'elles ont vu, à travers moi et mes copines, que nous aussi, nous pouvons devenir de bons bâtisseurs. Nous avons acquis beaucoup de compétences que nous allons pouvoir mettre en œuvre en travaillant au bénéfice de nos familles, et de notre pays. J'avais d'ailleurs commencé à travailler dès le troisième mois de formation, les week-ends et jours fériés.»